Le prophète assis

Atelier du Maître du retable d’Hakendover, début 15e siècle, noyer décapé, collection Fonds Claire et Michel Lemay, Fondation Roi Baudouin.

~ L'AVIS DE L'EXPERT ~

Michel Lefftz

Université de Namur

Emmanuelle Mercier

Institut Royal du Patrimoine Artistique (Bruxelles)

Cette exceptionnelle statuette témoigne de l’activité de celui qui fut l’un des plus importants sculpteurs de nos régions, autour des années 1400. Malheureusement, à l’exception du retable de l’église d’Hakendover, de celui de l’église Saint-Rénald de Dortmund et de la seule œuvre datée, le tabernacle de l’église Saint-Martin à Halle (1409), son œuvre est aujourd’hui dispersée dans divers musées, car les retables dont ils provenaient pour la plupart ont été démantelés.

Si on a pu penser à un moment que cette statuette, tout comme son pendant volé au début des années 1990, était un modèle pour des sculptures de plus grande dimension, ce point de vue est aujourd’hui totalement abandonné, pour deux raisons. La première tient à la présence de traces dans la base qui attestent en effet de la fixation de la statuette dans une structure architectonique, très vraisemblablement un retable. La seconde raison se fonde sur la présence de la polychromie qui recouvrait entièrement la statuette à l’origine et dont il reste quelques traces infimes dans les creux.

D’autres statuettes de dimensions comparables et attribuées au maître conservent leur polychromie d’origine comme les deux prophètes de la Liebieghaus de Francfort-sur-le-Main (Inv. Nr.: 0901, 0902). Elles donnent une idée de l’aspect originel du prophète d’Ath : vêtements entièrement dorés sans distinction entre avers et revers des lés ; carnations rose pâle avec des joues rehaussées de rose-orangé ; barbes et chevelures dorées ; yeux, sourcils et poils de la barbe indiqués en brun.

Avec sa longue barbe, son bonnet et surtout son phylactère, ce personnage assis reprend parfaitement le type du prophète vers 1400. La dextérité technique du sculpteur s’exprime dans l’aisance avec laquelle il dégage les formes du bloc de noyer, avec un geste sûr et précis.

Cette virtuosité éclate dans le rendu expressif des drapés dont l’ondoiement et le moelleux trouvent leur accomplissement dans la chute de plis en cônes et en cornets qui s’emboîtent les uns dans les autres en tombant du genou droit. Le visage, la barbe et les cheveux témoignent d’un travail plus rapide, volontairement plus sommaire, car les formes dégagées par le sculpteur devaient recevoir le complément indispensable de la couche de polychromie.

~ UN AUTRE REGARD ~

Christophe Degand

Président du CPAS d’Ath

Notre prophète est assis sur un siège au milieu de nous. Il est pensif. Visiblement le prophète est un personnage public important, un sage qui tient en main un phylactère. Comme Œdipe, résolvant l’énigme du Sphinx, il sait déjà qu’il aura besoin d’un bâton pour vieillir heureux quoi que puisse lui réserver le destin.

Quel est son âge ? Peut-être s’agit-il d’un géronte, membre d’un conseil des anciens qui veille sur l’harmonie et le bien-être au sein de la Cité des Géants à l’instar du Conseil Consultatif Communal des Aînés athois, reflet d’une démocratie participative des seniors. Peut-être a-t-il pris des notes sur cette idée de « bien vieillir » qui touche toutes les générations. Mais qui écoute de nos jours l’enseignement de celui qui par son savoir a accédé à la Connaissance, être l’interprète du divin et prévoir notre avenir ?

Depuis sa création, il y a 40 ans, le CPAS fait partie des acteurs sociaux porteurs de projets pour la qualité de vie des aînés. L’accueil des personnes âgées est au cœur de nos missions. Le CPAS d’Ath gère 208 lits en maison de repos dont 100 MRS à la « La Roselle ». Le comité des résidents assure un dialogue constructif. 182 agents se consacrent au bien-être quotidien des résidents en ayant soin d’investir régulièrement pour répondre à toutes les normes de confort. 80 % des investissements du CPAS sont réservés aux maisons de repos et ce pour faire face aux maladies liées au vieillissement.

Assurer un logement est une autre priorité. Nous gérons 80 logements dont 46 pour les plus de 65 ans et 34 pour la catégorie « tous âges ». 12 seniors sont dans la précarité : nous les aidons au travers du droit à l’intégration sociale. Parce que la mobilité est un besoin légitime à tout âge, le CPAS, en collaboration avec Solidath, permet à plus de 60 personnes de bénéficier d’un service de taxi social. Des ateliers ouverts à tout public sont mis en place pour lutter contre l’isolement et la solitude et permettent d’avoir des lieux d’échanges. En matière de santé, l’installation du PMG (Poste Médical de Garde) dans nos locaux traduit la volonté d’assurer un service de garde médical de proximité.

Les animations en maisons de repos font la part belle aux activités intergénérationnelles et à l’accès à la culture. L’accès aux nouvelles technologies n’est pas oublié avec les « papys et mamys surfeurs ». Le CPAS est aussi partenaire du plan communal de cohésion sociale.

Ainsi donc, « La dignité au cœur de la cité » passe aussi par le respect des aînés et la solidarité intergénérationnelle pour une intégration réussie dans la vie quotidienne. Développer ces partenariats et ces projets participe d’une vision positive de la dignité des seniors au cœur de notre cité. Seul un faux prophète affirmera qu’on ne vieillit pas.